T.

The repressed idea takes its revenge by Freud & Breuer

Now I already knew from the analysis of similar cases that before hysteria can be acquired for the first time one essential condition must be fulfilled: an idea must be intentionally repressed from consciousness and excluded from associative modification. In my view this intentional repression is also the basis for the conversion, whether total or partial, of the sum of excitation. The sum of excitation, being cut off from psychical association, finds its way all the more easily along the wrong path to a somatic innervation. The basis for repression itself can only be a feeling of unpleasure, the incompatibility between the single idea that is to be repressed and the dominant mass of ideas constituting the ego. The repressed idea takes its revenge, however, by becoming pathogenic.

Sigmund Freud, Joseph BreuerSTUDIES ON HYSTERIA (1893-1895), p. 87

Or, l’analyse de cas analogues m’avait appris que l’on découvre immanquablement dans tous les cas d’hystérie nouvellement acquise, une cause psychique et qu’il faut qu’une certaine représentation ait été intentionnellement refoulée du conscient et exclue de l’élaboration associative. C’est dans ce refoulement intentionnel que gît, à mon avis, le motif de la conversion totale ou partielle de la somme d’excitation. Cette somme qui n’est pas destinée à entrer dans une association psychique trouve d’autant plus facilement un mauvais débouché vers l’innervation corporelle. Ce refoulement ne peut être dû qu’à un sentiment de déplaisir, celui de l’incompatibilité de l’idée à refouler avec l’ensemble des représentations dominantes du moi. L’idée refoulée se venge alors en devenant parthogène.

Sigmund Freud, Joseph BreuerEtudes sur l’hystérie (1893-1895), Puf, Paris, 2007, p. 91

B.

Black woman is a product of historical forces by Calvin C. Hernton

The personality, or ego, of the black woman is a product of and a response to all of the historical forces of American society. Among these forces, racism, or white supremacy, has had the most powerful effect, shaping both the way whites treat and conceive of the black woman, and the very attitudes that black women have towards themselves.

Calvin C. HerntonSex And Racism in America (1965), Anchor Books , 1992, NYC, p. 133

La personnalité, ou le moi, de la femme noire est un produit et une réponse à toutes les forces historiques de la société américaine. Parmi ces forces, le racisme, ou suprématie blanche, a eu l’effet le plus puissant, façonnant à la fois la façon dont les Blancs traitent et conçoivent la femme noire, et l’attitude même des femmes noires envers elles-mêmes.

Calvin C. Hernton, Sex And Racism in America (1965), Anchor Books , 1992, NYC, p. 133

Calvin C. HerntonSex And Racism in America (1965), Anchor Books , 1992, NYC, p. 133

C.

Conviction of the existence of the unconscious by Sigmund Freud

But where and how is the poor wretch to acquire the ideal qualifications which he will need in his profession? The answer is, in an analysis of himself, with which his preparation for his future activity begins. For practical reasons this analysis can only be short and incomplete. Its main object is to enable his teacher to make a judgement as to whether the candidate can be accepted for further training. It has accomplished its purpose if it gives the learner a firm conviction of the existence of the unconscious, if it enables him, when repressed material emerges, to perceive in himself things which would otherwise be incredible to him, and if it shows him a first sample of the technique which has proved to be the only effective one in analytic work. This alone would not suffice for his instruction; but we reckon on the stimuli that he has received in his own analysis not ceasing when it ends and on the processes of remodelling the ego con tinuing spontaneously in the analysed subject and making use of all subsequent experiences in this newly-acquired sense. This does in fact happen, and in so far as it happens it makes the analysed subject qualified to be an analyst himself.

Sigmund Freud, “Analysis Terminable and Interminable” (1937), Standard Edition Vol XXIII, Trans. James Strachey, The Hogarth Press, London, 1964, pp. 248-249

Mais où et comment le pauvre malheureux doit-il acquérir cette aptitude idéale dont il aura besoin dans ce métier ? La réponse sera: dans l’analyse personnelle, par laquelle commence sa préparation à sa future activité. Pour des raisons pratiques, celle-ci ne peut être que brève et incomplète; son but majeur est de donner au maître la possibilité de juger si le candidat peut être admis à poursuivre sa formation. Sa tâche est accomplie si elle apporte à l’apprenti la ferme conviction de l’existence de l’inconscient, si elle lui procure lors de l’émergence du refoulé les perceptions de soi sans cela non crédibles et si, sur un premier échantillon, elle lui indique la technique qui est la seule à avoir fait ses preuves dans l’activité analytique. Cela seul ne suffirait pas à son instruction, mais on escompte que les incitations contenues dans l’analyse personnelle ne prendront pas fin avec l’arrêt de celle-ci, que les procès de remaniement du moi se poursuivront spontanément chez l’analysé et qu’ils utiliseront toutes les expériences à venir dans le sens nouvellement acquis. C’est en effet ce qui se produit et, dans la mesure où cela produit, cela rend l’analysé apte à être analyste.

Sigmund FreudL’analyse finie et l’analyse infinie (1937), PUF, Paris, 2021, pp. 38-39

Sigmund FreudL’analyse finie et l’analyse infinie (1937), PUF, Paris, 2021, pp. 38-39

T.

Two primal instincts-Eros and the death-instinct by Sigmund Freud

Here we are dealing with the ultimate things which psychological research can learn about; the behaviour of the two primal instincts, their distribution, mingling and defusion things which we cannot think of as being confined to a single province of the mental apparatus, the id, the ego or the superego. No stronger impression arises from the resistances during the work of analysis than of there being a force which is defending itself by every possible means against recovery and which is resolved to hold on to illness and suffering. One portion of this force has been recognized by us, undoubt edly with justice, as the sense of guilt and need for punishment, and has been localized by us in the ego’s relation to the superego. But this is only the portion of it which is, as it were, psychically bound by the superego and thus becomes recognizable; other quotas of the same force, whether bound or free, may be at work in other, unspecified places. If we take into consideration the total picture made up of the phenomena of masochism immanent in so many people, the negative therapeutic reaction and the sense of guilt found in so many neurotics, we shall no longer be able to adhere to the belief that mental events are exclusively governed by the desire* for pleasure. These phenomena are unmistakable indications of the presence of a power in mental life which we call the instinct of aggression or of destruction according to its aims, and which we trace back to the original death instinct of living matter. It is not a question of an antithesis between an optimistic and a pessimistic theory of life. Only by the concurrent or mutually opposing action of the two primal instincts-Eros and the death-instinct, never by one or the other alone, can we explain the rich multiplicity of the phenomena of life.

Sigmund Freud, “Analysis Terminable and Interminable” (1937), Standard Edition Vol XXIII, Trans. James Strachey, The Hogarth Press, London, 1964, pp. 242-243

Il s’agit ici du dernier point que l’exploration psychologique puisse de toute façon reconnaître, le comportement des deux pulsions originaires, leur répartition, mélange et démixtion, choses qu’il ne faut pas représenter limitées à une seule et unique province de l’appareil animique – ça, moi et surmoi. Il n’est pas d’impression émanant des résistances lors du travail analytique qui soit plus puissante que celle donnée par une force qui se défend par tous les moyens contre la guérison et veut absolument rester attachée à la maladie et à la souffrance. Une part de cette force, nous l’avons, sans aucun doute à bon droit, identifiée comme conscience de culpabilité et besoin de punition, et localisée dans le rapport du moi au surmoi. Mais il s’agit que de cette part qui est en quelque sorte psychiquement liée par le surmoi et devient de cette façon connaissable; d’autres montants de cette même force doivent être à l’œuvre, on ne sait trop où, sous une forme liée ou libre. Si l’on considère dans son ensemble le tableau dans lequel se regroupent les manifestations du masochisme immanent de tant de personnes, celles de la réaction thérapeutique négative et de la conscience de culpabilité des névrosés, on ne pourra plus adhérer à la croyance que l’advenir animique est exclusivement dominé par la tendance* au plaisir. Ces phénomènes sont des indices impossibles à méconnaître de l’existence dans la vie d’âme d’une puissance que d’après ses buts nous appelons pulsion d’agression ou de destruction et que nous faisons dériver de la pulsion de mort originelle de la matière douée de vie. Il n’est pas question d’une opposition entre une théorie de vie optimiste et une théorie pessimiste; seule l’action conjointe et antagoniste des deux pulsions originaires, Eros et pulsion de mort, explique la bigarrure des manifestations de la vie, jamais une seule d’entre elles.

Sigmund FreudL’analyse finie et l’analyse infinie (1937), PUF, Paris, 2021, pp. 32-33

Sigmund FreudL’analyse finie et l’analyse infinie (1937), PUF, Paris, 2021, pp. 32-33

*Translation Note :
What Strachey translated into “desire” was bring to french as “tendance” – a trend.
In the source text in German – Sigmund Freud, Internationale zeitschrift für psychoanalyse XXIII (2) (1937), p. 232,
the word is “Luststreben” : which may mean “aspiration for pleasure”. Here is the german sentence :

Hält man sich das Bild in seiner Gesamtheit vor, zu dem sich die Erscheinungen des immanenten Masochismus so vieler Personen, der negativen therapeutischen Reaktion und des Schuldbewußtseins der Neurotiker zusammensetzen, so wird man nicht mehr dem Glauben anhängen können, daß das seelische Geschehen aus schließlich vom Luststreben beherrscht wird.

D.

Dangers which no longer exist in reality by Sigmund Freud

More over, these mechanisms are not relinquished after they have assisted the ego during the difficult years of its development. No one individual, of course, makes use of all the possible mechanisms of defence. Each person uses no more than a selection of them. But these become fixated in his ego. They become regular modes of reaction of his character, which are repeated throughout his life whenever a situation occurs that is similar to the original one. This turns them into infantilisms, and they share the fate of so many institutions which attempt to keep themselves in existence after the time of their usefulness has passed. “Vernunft wird Unsinn, Wohltat Plage”* as the poet complains. The adult’s ego, with its increased strength, continues to defend itself against dangers which no longer exist in reality; indeed, it finds itself compelled to seek out those situations in reality which can serve as an approximate substitute for the original danger, so as to be able to justify, in relation to them, its maintaining its habitual modes of reaction. Thus we can easily understand how the defensive mechanisms, by bringing about an ever more extensive alienation from the external world and a permanent weakening of the ego, pave the way for, and encourage, the outbreak of neurosis.

Sigmund Freud, “Analysis Terminable and Interminable” (1937), Standard Edition Vol XXIII, Trans. James Strachey, The Hogarth Press, London, 1964, pp. 237-238

De plus, ces mécanismes ne sont pas congédiés après avoir tiré le moi d’embarras dans les dures années de son développement. Chaque per sonne n’utilise naturellement pas tous les mécanismes de défense possibles, mais se contente de faire un certain choix parmi eux; toutefois ceux-ci se fixent dans le moi, ils deviennent des modes de réaction réguliers du caractère, qui se répètent durant toute une vie, aussi sou vent que fait retour une situation semblable à la situation d’origine. De ce fait, ils deviennent des infantilismes, partageant le destin de tant d’institutions qui tendent à se maintenir au-delà du temps où elles étaient utiles. «La raison devient non-sens, le bienfait calamité»*, comme le déplore le poète. Le moi renforcé de l’adulte continue à se défendre contre des dangers qui n’existent plus dans la réalité, il se trouve même poussé à aller rechercher ces situations de la réalité qui peuvent plus ou moins remplacer le danger d’origine afin de pouvoir justifier à leur contact qu’il reste attaché aux modes de réaction habituels Par là il devient facile de comprendre comment les mécanismes de défense, par un étrangement de plus en plus envahissant à l’égard du monde extérieur et par un affaiblissement durable du moi, préparent et favorisent l’éruption de la névrose.

Sigmund FreudL’analyse finie et l’analyse infinie (1937), PUF, Paris, 2021, p. 27

Sigmund FreudL’analyse finie et l’analyse infinie (1937), PUF, Paris, 2021, p. 24

*Goethe, Faust, Part 1, Scène 4.

E.

Ego can only be an ideal-ego by Susann Heenen-Wolff

The specular ego is an illusion in the shape of an ideal-ego, a grandiose narcissistic ego, indispensable for the constitution of the ego, and which allows a narcissistic triumph – a jubilation – following a (presumed) concordance of the ego and the ideal-ego. Since such a recognition rests on a misrecognition, Lacan speaks about the “imaginary ego” (Lacan, 1948): to recognize oneself is at the same time to misrecognize oneself: the child does not see himself in the mirror but only his image reflected – and glorified – by the gaze of the adult. For this reason, according to Lacan, the ego can only be an ideal-ego: the mirror gives to the child the image of an integrated body and of its control, which camouflages its Hilflosigkeit (distress/dependence, “desaide”).

Le moi spéculaire est une illusion en forme d’un moi-idéal, un soi narcissique grandiose, indispensable pour la constitution du moi, et qui permet un triomphe narcissique – une jubilation – à la suite d’une concordance (présumée) du moi et du Moi-Idéal. Puisqu’une telle reconnaissance repose sur une connaissance, Lacan parle du « moi imaginaire » (Lacan, 1948) : se reconnaître est en même temps se méconnaître : l’enfant ne se voit pas soi dans le miroir mais seulement son image reflété – et glorifiée – par le regard de l’adulte. Pour cette raison, selon Lacan, le moi ne peut être qu’un moi-idéal : le miroir donne à l’enfant l’image d’un corps intégré et de sa maîtrise, ce qui camoufle sa Hilflosigkeit (détresse/dépendance, « desaide »).

Susann HEENEN-WOLFF, « L’identité de genre – une approche métapsychologique », Cahiers de psychologie clinique, 2022/2 (n° 59), p. 31-51
DOI : 10.3917/cpc.059.0031.
URL : https://www.cairn.info/revue-cahiers-de-psychologie-clinique-2022-2-page-31.htm

N.

Normality in general : an ideal fiction by Sigmund Freud

As is well known, the analytic situation consists in our allying ourselves with the ego of the person under treatment, in order to subdue portions of his id which are uncontrolled-that is to say to include them in the synthesis of his ego. The fact that a co-operation of this kind habitually fails in the case of psychotics affords us a first solid footing for our judgement. The ego, if we are to be able to make such a pact with it, must be a normal one. But a normal ego of this sort is, like normality in general, an ideal fiction. The abnormal ego, which is unserviceable for our purposes, is unfortunately no fiction. Every normal person, in fact, is only normal on the average. His ego approximates to that of the psychotic in some part or other and to a greater or lesser extent; and the degree of its remoteness from one end of the series and of its proximity to the other will furnish us with a provisional measure of what we have so indefinitely termed an ‘alteration of the ego’.

Sigmund Freud, “Analysis Terminable and Interminable” (1937), Standard Edition Vol XXIII, Trans. James Strachey, The Hogarth Press, London, 1964, p. 235

La situation analytique consiste, comme on sait, en ce que nous nous alliions au moi de la personne objet pour soumettre les parts non dominées de son ça, donc pour les intégrer dans la synthèse du moi. Le fait qu’une telle collaboration échoue régulièrement chez le psychotique confère à notre jugement un premier point d’appui. Le moi avec lequel nous pouvons conclure un tel pacte doit être un moi normal. Mais un tel moi-normal est, comme la normalité en général, une fiction d’idéal. Le moi anormal, inutilisable pour nos visées, n’en est malheureusement pas une. Toute personne normale n’est en fait que moyennement normale, son moi se rapproche de celui du psychotique dans telle ou telle partie, dans une plus ou moins grande mesure, et le degré d’éloignement par rapport à l’une des extrémités de la série et de rapprochement par rapport à l’autre nous servira provisoirement de mesure pour cette modification du moi caractérisée de façon si imprécise.

Sigmund FreudL’analyse finie et l’analyse infinie (1937), PUF, Paris, 2021, p. 24

Sigmund FreudL’analyse finie et l’analyse infinie (1937), PUF, Paris, 2021, p. 24

W.

Where we first saw our ego by Jacques Lacan

What is the point? – if not to see what the function of the other, of the human other, is, in the adequation of the imaginary and the real.
Here we’ll take up the little schema again. The finishing touch I added to it in our last session constitutes an essential element of what I am trying to demonstrate. The real image can only be seen in a consistent fashion within a limited field of the real space of the apparatus, the field in front of the apparatus, as constituted by the spherical mirror and the inverted bouquet.
We have placed the subject at the edge of the spherical mirror. But we know that the seeing of an image in the plane mirror is strictly equivalent for the subject to an image of the real object, which would be seen by a spectator beyond this mirror, at the very spot where the subject sees his image. We can therefore replace the subject by a virtual subject, VS, placed inside the cone which limits the possibility of the illusion – that’s the field x’y’. The apparatus that I’ve invented shows, then, how, in being placed at a point very close to the real image, one is nevertheless capable of seeing it, in a mirror, as a virtual image. That is what happens in man.
What follows from this? A very special symmetry. In fact, the virtual subject, reflection of the mythical eye, that is to say the other which we are, is there where we first saw our ego – outside us, in the human form. This form is outside of us, not in so far as it is so constructed as to captate sexual behaviour, but in so far as it is fundamentally linked to the primitive impotence of the human being. The human being only sees his form materialised, whole, the mirage of himself, outside of himself.

Jacques Lacan, The Seminar of Jacques Lacan – Book I – Freud’s paper on Technique (1953-1954), Trans. John Forrester, Norton Paperback, New-York, 1991, p. 139 – 140
where we first saw our ego - outside us - Lacan - Seminaire I

De quoi s’agit-il? – sinon de voir quelle est la fonction de l’autre, de l’autre humain, dans l’adéquation de l’imaginaire et du réel.
Nous retrouvons là le petit schéma. Je lui ai apporté à la dernière séance un perfectionnement qui constitue une partie essentielle de ce que je cherche à démontrer. L’image réelle ne peut être vue de façon consistante que dans un certain champ de l’espace réel de l’appareil, le champ en avant de l’appareil constitué par le miroir sphérique et le bouquet renversé.
Nous avons situé le sujet sur le bord du miroir sphérique. Mais nous savons que la vision d’une image dans le miroir plan est exactement équivalente pour le sujet à ce que serait l’image de l’objet réel pour un spectateur qui serait au-delà de ce miroir, à la place même où le sujet voit son image. Nous pouvons donc remplacer le sujet par un sujet virtuel, SV, situé à l’intérieur du cône qui délimite la possibilité de l’illusion – c’est le champ x’y’. L’appareil que j’ai inventé montre donc qu’en étant placé dans un point très proche de l’image réelle, on peut néanmoins la voir, dans un miroir, à l’état d’image virtuelle. C’est ce qui se produit chez l’homme.
Qu’en résulte-t-il? Une symétrie très particulière. En effet, le sujet virtuel, reflet de l’œil mythique, c’est-à-dire l’autre que nous sommes, est là où nous avons d’abord vu notre ego – hors de nous, dans la forme humaine. Cette forme est hors de nous, non pas en tant qu’elle est faite pour capter un comportement sexuel, mais en tant qu’elle est fondamentalement liée à l’impuissance primitive de l’être humain. L’être humain ne voit sa forme réalisée, totale, le mirage de lui-même, que hors de lui-même.

Jacques Lacan, Le Séminaire – Livre I – Les écrits techniques de Freud (1953-1954), Le Seuil, 1998, p. 220 – 221

Jacques LacanLe Séminaire – Livre I – Les écrits techniques de Freud (1953-1954), Le Seuil, 1998, p. 220 – 221

W.

We find the two terms ‘ideal ego’ and ‘ego ideal’ by Jacques Lacan

DR LECLAIRE: The text goes onNarcissism seems to make its appearance displaced on to this new ideal ego, which finds itself in possession of all the ego’s precious perfections, in the same way as the infantile ego was. As always where the libido is concerned, man has here again shown himself incapable of giving up a satisfaction he had once enjoyed. For the first time Freud uses the term ‘ideal ego‘ in this sentence – this ideal ego is now the target of the self-love which was enjoyed in childhood by the true ego. But he then says – He is not willing to forgo the narcissistic perfection of his childhood and […] he seeks to recover it in the new form of an ego-ideal. Here we find the two terms ‘ideal ego’ and ‘ego ideal’. Given the rigour of Freud’s writing, one of the puzzles of this text, very well brought out by Leclaire, is the coexistence in the same paragraph of the two terms.

Jacques Lacan, The Seminar of Jacques Lacan – Book I – Freud’s paper on Technique (1953-1954), Trans. John Forrester, Norton Paperback, New-York, 1991, p. 133

Le texte poursuit – Le narcissisme paraît dévié sur son nouveau moi-idéal qui se trouve en possession de toutes les précieuses perfections du moi, comme le moi infantile. L’homme s’est montré incapable, comme toujours dans le domaine de la libido, de renoncer à une satisfaction une fois obtenue. Freud emploie pour la première fois le terme de moi-idéal dans la phrase – c’est vers ce moi idéal que va maintenant l’amour de soi, dont jouissait, chez l’enfant, le véritable moi. Mais il dit ensuite – Il ne veut pas renoncer à la perfection narcissique de son enfance, et […] il cherche à la regagner dans la forme nouvelle de son idéal du moi. Figurent donc ici les deux termes de moi-idéal et d’idéal du moi. Étant donné la rigueur de l’écriture de Freud, c’est une des énigmes de ce texte qu’a très bien relevée Leclaire que la coexistence, dans le même paragraphe, des deux termes.

Jacques Lacan, Le Séminaire – Livre I – Les écrits techniques de Freud (1953-1954), Le Seuil, 1998, p. 211

Jacques LacanLe Séminaire – Livre I – Les écrits techniques de Freud (1953-1954), Le Seuil, 1998, p. 211

T.

The other has a captivating value by Jacques Lacan

For man the other has a captivating value, on account of the anticipation that is represented by the unitary image as it is perceived either in the mirror or in the entire reality of the fellow being.
The other, the alter ego, is more or less confused, according to the stage in life, with the Ichideal, this ego-ideal invoked throughout Freud‘s article. Narcissistic identification – the word identification, without differentiation, is unusable that of the second narcissism, is identification with the other which, under normal circumstances, enables man to locate precisely his imaginary and libidinal relation to the world in general. That is what enables him to see in its place and to structure, as a function of this place and of his world, his being. Mannoni said ontological just now, I’m quite happy with that. What I would precisely say is – his libidinal being. The subject sees his being in a reflection in relation to the other, that is to say in relation to the Ichideal.
Hence you see that one has to distinguish between the functions of the ego on the one hand, they play for man, as they do for every other living creature, a fundamental role in the structuration of reality – what is more, in man they have to undergo this fundamental alienation constituted by the reflected image of himself, which is the Ur-Ich, the original form of the Ichideal as well as that of the relation to the other.

Jacques Lacan, The Seminar of Jacques Lacan – Book I – Freud’s paper on Technique (1953-1954), Trans. John Forrester, Norton Paperback, New-York, 1991, p. 125-126

L’autre a pour l’homme valeur captivante, de par l’anticipation que représente l’image unitaire telle qu’elle en est perçue soit dans le miroir, soit dans toute réalité du semblable.
L’autre, l’alter ego, se confond plus ou moins, selon les étapes de la vie, avec l’Ich-Ideal, cet idéal du moi tout le temps invoqué dans l’article de Freud. L’identification narcissique – le mot d’identification, indifférencié, est inutilisable celle du second narcissisme, c’est l’identification à l’autre qui, dans le cas normal, permet à l’homme de situer avec précision son rapport imaginaire et libidinal au monde en général. C’est là ce qui lui permet de voir à sa place, et de structurer, en fonction de cette place et de son monde, son être. Mannoni a dit ontologique tout à l’heure, moi je veux bien. Je dirai exactement – son être libidinal. Le sujet voit son être dans une réflexion par rapport à l’autre, c’est-à-dire par rapport à l’Ich-Ideal.
Vous voyez là qu’il faut distinguer entre les fonctions du moi – d’une part, elles jouent pour l’homme comme pour tous les autres êtres vivants un rôle fondamental dans la structuration de la réalité – d’autre part, elles doivent chez l’homme passer par cette aliénation fondamentale que constitue l’image réfléchie de soi-même, qui est l’Ur-Ich*, la forme originelle de l’Ich-Ideal aussi bien que du rapport avec l’autre.

Jacques Lacan, Le Séminaire – Livre I – Les écrits techniques de Freud (1953-1954), Le Seuil, 1998, p. 200

Jacques LacanLe Séminaire – Livre I – Les écrits techniques de Freud (1953-1954), Le Seuil, 1998, p. 200

I.

Image of the body gives the subject the first form by Jacques Lacan

And it is here that the image of the body gives the subject the first form which allows him to locate what pertains to the ego and what does not. Well then, let us say that the image of the body, if we locate it in our schema, is like the imaginary vase which contains the bouquet of real flowers. That’s how we can portray for ourselves the subject of the time before the birth of the ego, and the appearance of the latter. I’m schematising, as you’re quite well aware, but developing a metaphor, a thinking apparatus, requires that from the start one give a sense of what its use is. You will see that this apparatus here possesses a versatility which allows for all sorts of movement. You can invert the experiment’s conditions – the pot could just as well be underneath and the flowers on top. You could make what is real imaginary at your discretion, on condition that you retain the relation of the signs, + — + or — + —.
For there to be an illusion, for there to be a world constituted, in front of the eye looking, in which the imaginary can include the real and, by the same token, fashion it, in which the real also can include and, by the same token, locate the imaginary, one condition must be fulfilled – as I have said, the eye must be in a specific position, it must be inside the cone.

Jacques Lacan, The Seminar of Jacques Lacan – Book I – Freud’s paper on Technique (1953-1954), Trans. John Forrester, Norton Paperback, New-York, 1991, p. 79-80
The experiment of the inverted bouquet by Lacan

Et c’est là que l’image du corps donne au sujet la première forme qui lui permette de situer ce qui est du et ce qui ne l’est pas. Eh bien, disons que l’image du corps, si on la situe dans notre schéma, est comme le vase imaginaire qui contient le bouquet de fleurs réel. Voilà comment nous pouvons nous représenter le sujet d’avant la naissance du moi, et le surgissement de celui-ci.
Je schématise, vous le sentez bien, mais le développement d’une métaphore, d’un appareil à penser, nécessite qu’au départ on fasse sentir à quoi ça sert. Vous verrez que cet appareil-ci a une maniabilité qui permet de jouer de toutes sortes de mouvements. Vous pouvez renverser les conditions de l’expérience – le pot pourrait aussi bien être en dessous, et les fleurs dessus. Vous pouvez à votre gré faire imaginaire ce qui est réel, à condition de conserver le rapport des signes, +-+ ou -+-.
Pour que l’illusion se produise, pour que se constitue, devant l’œil qui regarde, un monde où l’imaginaire peut inclure le réel et, du même coup, le former, où le réel aussi peut inclure et, du même coup, situer l’imaginaire, il faut qu’une condition soit réalisée – je vous l’ai dit, l’œil doit être dans une certaine position, il doit être à l’intérieur du cône.

Jacques Lacan, Le Séminaire – Livre ILes écrits techniques de Freud (1953-1954), Le Seuil, 1998, p. 129

Jacques LacanLe Séminaire – Livre I – Les écrits techniques de Freud (1953-1954), Le Seuil, 1998, p. 129

I.

Ideal of analysis is not complete self mastery by Jacques Lacan

Or, again, the ego is on the one hand like an empty egg, differentiated at its surface through contact with the world of perception, but it is also, each time we encounter it, that which says no or me, I, which says one, which speaks about others, which expresses itself in different registers. We are going to employ the techniques of an art of dialogue. Like the good cook, we have to know what joints, what resistances, we will encounter. The super-ego is a law deprived of meaning, but one which nevertheless only sustains itself by language. If I say you turn to the right, it’s to allow the other to bring his language into line with mine. I think of what goes through his head when I speak to him. This attempt to find an agreement constitutes the communication specific to language. This you is so fundamental that it arises before consciousness. Censorship, for example, which is intentional, neverthe less comes into action before consciousness, functioning with vigilance. You is not a signal, but a reference to the other – it is order and love.
In the same way, the ego-ideal is an organism of defence established by the ego in order to extend the subject’s satisfaction. But it is also the function that depresses most, in the psychiatric meaning of the term. The id is not reducible to a pure and objective given, to the drives of the subject. An analysis never leads to specifying a given quantity of aggressivity or erotism. The point to which analysis leads, the end point of the dialectic of existential recognition, is – You are this. In practice this ideal is never reached. The ideal of analysis is not complete self mastery, the absence of passion. It is to render the subject capable of sustaining the analytic dialogue, to speak neither too early, nor too late. Such is the aim of a training analysis.

Jacques Lacan, The Seminar of Jacques Lacan – Book I – Freud’s paper on Technique (1953-1954), Trans. John Forrester, Norton Paperback, New-York, 1991, p. 3

Ou encore, l’ego est d’une part comme un œuf vide, différencié à sa surface par le contact du monde de la perception, mais il est aussi, chaque fois que nous le rencontrons, celui qui dit non ou moi, je, qui dit on, qui parle des autres, qui s’exprime dans différents registres.
Nous allons suivre les techniques d’un art du dialogue. Comme le bon cuisinier, nous avons à savoir quels joints, quelles résistances, nous rencontrons. Le super-ego est une loi dépourvue de sens, mais qui pourtant ne se supporte que du langage. Si je dis tu prendras à droite, c’est pour permettre à l’autre d’accorder son langage au mien. Je pense à ce qui se passe dans sa tête au moment où je lui parle. Cet effort pour trouver un accord constitue la communication propre au langage. Ce tu est tellement fondamental qu’il intervient avant la conscience. La censure, par exemple, qui est intentionnelle, joue pourtant avant la conscience, elle fonctionne avec vigilance. Tu n’est pas un signal, mais une référence à l’autre, il est ordre et amour.
De même, l’idéal du moi est un organisme de défense perpétué par le moi pour prolonger la satisfaction du sujet. Mais il est aussi la fonction la plus déprimante, au sens psychiatrique du terme. L’id n’est pas réductible à un pur donné objectif, aux pulsions du sujet. Jamais une analyse n’a abouti à déterminer tel taux d’agressivité ou d’érotisme. Le point à quoi conduit le progrès de l’analyse, le point extrême de la dialectique de la reconnaissance existentielle, c’est – Tu es ceci. Cet idéal n’est en fait jamais atteint. L’idéal de l’analyse n’est pas la maîtrise de soi complète, l’absence de passion. C’est de rendre le sujet capable de soutenir le dialogue analytique, de parler trop tôt, ni trop tard. C’est à cela que vise une analyse didactique.

Jacques Lacan, Le Séminaire – Livre I – Les écrits techniques de Freud (1953-1954), Le Seuil, 1998, p. 12

Jacques Lacan, Le Séminaire – Livre I – Les écrits techniques de Freud (1953-1954), Le Seuil, 1998, p. 12

F.

From ideal ego to ego ideal by Sigmund Freud

This ideal ego is now the target of the self-love which was enjoyed in childhood by the actual ego. The subject’s narcissism makes its appearance displaced on to this new ideal ego, which, like the infantile ego, finds itself possessed of every perfection that is of value. As always where the libido is concerned, man has here again shown himself incapable of giving up a satisfaction he had once enjoyed. He is not willing to forgo the narcissistic perfection of his childhood; and when, as he grows up, he is disturbed by the admonitions of others and by the awakening of his own critical judgement, so that he can no longer retain that perfection, he seeks to recover it in the new form of an ego ideal. What he projects before him as his ideal is the substitute for the lost narcissism of his childhood in which he was his own ideal.

Sigmund FreudOn Narcissism : An introduction (1914), Trans. James Strachey (1925)

C’est sur ce moi idéal que vient maintenant se porter l’amour de soi-même dont le moi réel jouissait pendant l’enfance. Le narcissisme apparaît s’être déplacé sur ce nouveau moi idéal qui, comme le moi infantile, se trouve en possession de toutes les précieuses perfections. L’être humain s’est révélé, comme c’est chaque fois le cas dans le domaine de la libido, incapable de renoncer à la satisfaction dont il a joui une fois. Il ne veut pas être privé de la perfection narcissique de son enfance et s’il n’est pas parvenu à la conserver, parce qu’il a été perturbé au cours de son développement par des rappels à l’ordre et que son jugement s’est éveillé, il cherche à la regagner sous la nouvelle forme de l’idéal du moi. Ce qu’il projette devant lui comme son idéal n’est que le substitut du narcissisme perdu de son enfance où il était son propre idéal.

Sigmund FreudPour introduire le narcissisme. Trad. Hélène Francoual, Éditions In press, Paris, 2017, p. 54-55-+

Sigmund FreudPour introduire le narcissisme (1914). Trad. Hélène Francoual, Éditions In press, Paris, 2017, p. 54-55

I.

Ideal would be the conditioning factor of repression by Sigmund Freud

Repression, we have said, proceeds from the ego; we might say with greater precision that it proceeds from the self-respect of the ego. The same impressions, experiences, impulses and desires that one man indulges or at least works over consciously will be rejected with the utmost indignation by another, or even stifled before they enter consciousness. The difference between the two, which contains the conditioning factor of repression, can easily be expressed in terms which enable it to be explained by the libido theory. We can say that the one man has set up an ideal in himself by which he measures his actual ego, while the other has formed no such ideal. For the ego the formation of an ideal would be the conditioning factor of repression.

Sigmund FreudOn Narcissism : An introduction (1914), Trans. James Strachey (1925)

Le refoulement, avons-nous dit, part du moi; nous pourrions préciser: de l’estime de soi qu’a le moi. Les mêmes impressions, expériences vécues, impulsions, motions de désir, que tel être humain laisse se développer en lui, ou, tout du moins, élabore consciemment, sont rejetées par tel autre avec une grande indignation ou déjà étouffée avant même qu’elles n’accèdent à la conscience Mais la différence entre les deux, qui constitue la condition du refoulement, peut être saisie facile ment par la théorie de la libido en des termes qui permettent d’en avoir la maîtrise. Nous pouvons dire que l’un a érigé en lui un idéal à l’aune duquel il évalue son moi actuel, tandis qu’il manque à l’autre une telle formation d’idéal. La formation de l’idéal serait, du côté du moi, la condition du refoulement.

Sigmund FreudPour introduire le narcissisme. Trad. Hélène Francoual, Éditions In press, Paris, 2017, p. 53-54

Sigmund FreudPour introduire le narcissisme (1914). Trad. Hélène Francoual, Éditions In press, Paris, 2017, p. 53 – 54

D.

Difference between paraphrenic affections and the transference neuroses by Sigmund Freud

The difference between paraphrenic affections and the transference neuroses appears to me to lie in the circumstance that, in the former, the libido that is liberated by frustration does not remain attached to objects in phantasy, but withdraws on to the ego. Megalomania would accordingly correspond to the psychical mastering of this latter amount of libido, and would thus be the counterpart of the introversion on to phantasies that is found in the transference neuroses; a failure of this psychical function gives rise to the hypochondria of paraphrenia and this is homologous to the anxiety of the transference neuroses. We know that this anxiety can be resolved by further psychical working-over, i.e. by conversion, reaction-formation or the construction of protections (phobias). The corresponding process in paraphrenics is an attempt at restoration, to which the striking manifestations of the disease are due.

Sigmund FreudOn Narcissism : An introduction (1914), Trans. James Strachey (1925)

Je situe la différence entre ces affections et les névroses de transfert dans le fait que la libido libérée par la frustration ne se maintient pas dans les objets du fantasme mais se retire sur le moi. Le délire des grandeurs correspond alors à la maîtrise psychique de cette quantité de libido, donc à l’introversion sur des formations de fantasme dans les névroses de transfert; l’hypochondrie de la paraphrénie, qui est l’homologue de l’angoisse des névroses de transfert, prend sa source dans la défaillance de cette action psychique. Nous savons que cette angoisse peut être relayée par une élaboration psychique ultérieure, c’est-à-dire par conversion, formation réactionnelle, formation de protection (phobie). Dans les paraphrénies, cette fonction est occupée par la tentative de restitution, à laquelle nous devons les symptômes les plus voyants de la maladie.

Sigmund FreudPour introduire le narcissisme. Trad. Hélène Francoual, Éditions In press, Paris, 2017, p.42

Sigmund FreudPour introduire le narcissisme. Trad. Hélène Francoual, Éditions In press, Paris, 2017, p.42

M.

Megalomania fails the damming-up of libido in the ego by Sigmund Freud

Working them over in the mind helps remarkably towards an internal draining away of excitations which are incapable of direct discharge outwards, or for which such a discharge is for the moment undesirable. In the first instance, however, it is a matter of indifference whether this internal process of working-over is carried out upon real or imaginary objects. The difference does not appear till later—if the turning of the libido on to unreal objects (introversion) has led to its being dammed up. In paraphrenics, megalomania allows of a similar internal working-over of libido which has returned to the ego; perhaps it is only when the megalomania fails that the damming-up of libido in the ego becomes pathogenic and starts the process of recovery which gives us the impression of being a disease.

Sigmund FreudOn Narcissism : An introduction (1914), Trans. James Strachey (1925)

L’élaboration psychique fait un travail extraordinaire pour la dérivation interne des excitations qui ne sont pas capables de trouver une décharge extérieure immédiate ou pour lesquelles une telle décharge ne serait pas sur le champ. Concernant une telle élaboration interne il est d’abord indifférent de savoir qu’elle ait lieu sur des objets réels ou bien imaginés. La différence n’apparaît que plus tard, lorsque le retournement de la libido sur les objets irréels (introversion) a conduit à une stase de la libido. Le délire des grandeurs permet chez les paraphrènes un semblable remaniement interne de la libido revenue dans le moi. Peut-être que la stase de la libido dans le moi ne devient pathogène qu’après l’échec de ce délire des grandeurs et anime le processus de guérison qui nous apparaît comme maladie.

Sigmund FreudPour introduire le narcissisme. Trad. Hélène Francoual, Éditions In press, Paris, 2017, p.41-42

Sigmund FreudPour introduire le narcissisme. Trad. Hélène Francoual, Éditions In press, Paris, 2017, p.41-42

W.

We must begin to love in order not to fall ill by Sigmund Freud

Here we may even venture to touch on the question of what makes it necessary at all for our mental life to pass beyond the limits of narcissism and to attach the libido to objects. The answer which would follow from our line of thought would once more be that this necessity arises when the cathexis of the ego with libido exceeds a certain amount. A strong egoism is a protection against falling ill, but in the last resort we must begin to love in order not to fall ill, and we are bound to fall ill if, in consequence of frustration, we are unable to love.

Sigmund FreudOn Narcissism : An introduction (1914), Trans. James Strachey (1925)

À partir de là, on peut même se risquer à aborder la question de savoir d’où provient donc la contrainte, pour la vie de l’âme, à aller au-delà des limites du narcissisme et à placer la libido sur les objets? La réponse qui découle de notre cheminement intellectuel dirait à son tour que cette contrainte apparaît lorsque l’investissement du moi en libido a dépassé une certaine mesure. Un solide égoïsme protège de la maladie mais, à la fin, il faut se mettre à aimer pour ne pas tomber malade, et on tombe nécessairement malade lorsque, à la suite d’une impossibilité, on ne peut aimer.

Sigmund FreudPour introduire le narcissisme. Trad. Hélène Francoual, Éditions In press, Paris, 2017, p.40-41

Sigmund FreudPour introduire le narcissisme. Trad. Hélène Francoual, Éditions In press, Paris, 2017, p.40-41

S.

Science foundation is observation alone by Sigmiund Freud

It is true that notions such as that of an ego-libido, an energy of the ego-instincts, and so on, are neither particularly easy to grasp, nor sufficiently rich in content; a speculative theory of the relations in question would begin by seeking to obtain a sharply defined concept as its basis. But I am of opinion that that is just the difference between a speculative theory and a science erected on empirical interpretation. The latter will not envy speculation its privilege of having a smooth, logically unassailable foundation, but will gladly content itself with nebulous, scarcely imaginable basic concepts, which it hopes to apprehend more clearly in the course of its development, or which it is even prepared to replace by others. For these ideas are not the foundation of science, upon which everything rests: that foundation is observation alone. They are not the bottom but the top of the whole structure, and they can be replaced and discarded without damaging it. The same thing is happening in our day in the science of physics, the basic notions of which as regards matter, centres of force, attraction, etc., are scarcely less debatable than the corresponding notions in psychoanalysis.

Sigmund Freud, On Narcissism : An introduction (1914), Trans. James Strachey (1925)

Assurément des représentations comme celle d’une libido du moi, énergie des pulsions du moi, etc., ne sont ni particulièrement claires à concevoir ni suffisamment consistantes. Une théorie spéculative des relations en aurait pour tâche principale d’apporter une définition précise qui serve de fondement. Pourtant, voilà, à mon avis, précisément la différence entre une théorie spéculative et une science édifiée sur l’interprétation de l’empirique. Cette dernière ne va pas disputer à la démarche spéculative le privilège de s’être fondée sans difficultés et d’être inattaquable d’un point de vue logique, mais au contraire se contenter volontiers de pensées fondamentales floues et évanescentes, que l’on a peine à se représenter, qu’elle espère pouvoir saisir plus clairement au cours de son développement et qu’elle est même aussi éventuellement prête à échanger contre d’autres. Ces idées ne sont pas en effet le fondement de la science sur lequel tout repose; ce fondement c’est bien plutôt l’observation seule. Elles ne son pas le soubassement mais le faîte de tout l’édifice et peuvent être remplacées et enlevées sans dommage Nous vivons actuellement une expérience similaire avec la physique, dont les conceptions fondamentales sur la matière, les centres de force, l’attraction et ainsi de suite sont à peine moins sujettes à caution que les conceptions correspondantes en psychanalyse.

Sigmund Freud, Pour introduire le narcissisme. Trad. Hélène Francoual, Éditions In press, Paris, 2017, p.27-28

Sigmund Freud, Pour introduire le narcissisme. Trad. Hélène Francoual, Éditions In press, Paris, 2017, p.27-28

S.

Shame and humiliation are entangled by Cathie Neunreuther

It should be noted that the two concepts of shame and humiliation are entangled when it comes to describing a person’s affective state. This is why my patients confused them… I would like to point out that the different terms we have studied so far essentially take on their sense of affect only during the Renaissance, when man begins to put himself at the center of his world. These meanings weaken and take an affective turn when individuation appears. On the side of humiliation, we are in the action. Humiliation designates an action, a scene or a scenario as a possible origin of shame, and by metaphor of this action, an “indifferent” agent of wounded self-esteem under which the persons acting or undergoing humiliation disappear. I would simply like to emphasize this triad for the moment: agent, state, action

Il faut remarquer que les deux concepts de honte et d’humiliation sont intriqués quand il s’agit de décrire l’état affectif d’une personne. C’est en cela que mes patients les confondaient… Je voudrais d’ailleurs faire observer que les différents termes que nous avons étudiés jusqu’ici ne prennent essentiellement leur sens d’affect qu’à la Renaissance, lorsque l’homme commence à se mettre au centre de son monde. Ces sens s’affaiblissent et prennent une tournure affective quand l’individuation apparaît. Du côté de l’humiliation, on est dans l’action. L’humiliation désigne une action, une scène ou un scénario comme origine possible de la honte, et par métaphore de cette action, un agent « indifférent » de blessure d’amour propre sous lequel disparaissent les personnes agissant ou subissant l’humiliation. Je voudrais simplement pour l’instant souligner cette triade : agent, état, action

Jean-Richard Freymann, Cathie Neunreuther, « 5. Honte et humiliation », dans : Jean-Richard Freymann éd., De la honte à la culpabilité. Toulouse, Érès, « Hypothèses », 2010, p. 69-90
DOI : 10.3917/eres.freym.2010.01.0069
URL : https://www.cairn.info/–9782749212142-page-69.htm

T.

The narcissistic wound of the shame by David Bernard

The narcissistic wound that shame constitutes is a rip, the forced and imposed reminder to the subject of what his image and his self concealed from him, and which concerns his lack-of-being, as much as his being of enjoyment. The moment of shame is an instant of seeing, which is an instant of truth. The egoic imposture is denounced, and the lining of the subject is experienced. The various occurrences of shame can then be defined as so many modalities of this reversal, affecting this subject even in his body.

La blessure narcissique que la honte constitue est une déchirure, le rappel forcé et imposé au sujet de ce que lui dissimulaient son image et son moi, et qui concerne son manque-à-être, autant que son être de jouissance. L’instant de honte est un instant de voir, qui est un instant de vérité. L’imposture moïque est dénoncée, et la doublure du sujet éprouvée. Les diverses occurrences de la honte pourront être alors définies comme autant de modalités de ce retournement, affectant ce sujet jusque dans son corps.

David BernardLacan et la honte – de la honte à l’ontologie, Editions nouvelles du Champ lacanien, Paris, 2019, p. 55

E.

Ego ideal at the decline of Oedipus by David Bernard

The Name-of-the-Father is that by which, and thanks to which, the child, at the end of the Oedipus, will separate himself from his imaginary identification to the phallus. The child will be shaken off, says Lacan, “unshackled”, detached from his position of metonymic object of the mother. At the end, the necessity of a symbolic identification will open for the child. No more the identification to an image, but an identification to the insignia of the Other, here the father, which insignia will come to constitute, to the decline of the Oedipus, the ego ideal. Finally, this identification with the insignia of the Other will have another consequence: a modification of the subject’s desire. From then on, the ego is not only an imaginary element in the relation to the mother, but subjectifies itself and becomes itself a signifying element.

Le Nom-du-Père est ce par quoi, et grâce à quoi, l’enfant au sortir de l’Œdipe, se séparera de son identification imaginaire au phallus. L’enfant sera ébranlé, indique Lacan, « débusqué», détachés de sa position d’objet métonymique de la mère. Au terme, s’ouvrira alors pour l’enfant la nécessité d’une identification symbolique. Non plus l’identification à une image, mais une identification aux insignes de l’Autre, ici le père, lesquels insignes viendront constituer, au déclin de l’Œdipe, l’idéal du moi. Enfin, cette identification aux insignes de l’Autre aura une autre conséquence : une modification du désir du sujet. Dès lors, le moi n’est plus seulement un élément imaginaire dans le rapport à la mère, mais se subjective et se fait lui-même élément signifiant.

David BernardLacan et la honte – de la honte à l’ontologie, Editions nouvelles du Champ lacanien, Paris, 2019, p. 25

quoting Jacques Lacan, Le Séminaire – Livre V – Les formations de l’inconscient (1957-1958), Le Seuil, Paris, 1998

S.

Shame’s ontological vertigo by David Bernard

The shame is first of all what shows a subject, under the eyes of everyone. What reveals its nakedness, and denounces its imposture. What flushes out him, knees folded up on his lack-to-be, behind his egoic (moïc) ornament in toc this “second skin” of loan. But it is also what points to the body this subject, and prints its mark on it. Eternizing the fatal instant which had the air of nothing, and leaving on this body, the irrecoverable beginning of a “mortification”. True “small red and streaked trace” which from there, will affect this subject of a true “small perfidious pain”. Mute cry in the abdomen. In addition to the experience of a lack, the shame would be thus also, the recall of a body in words, wounded, and in excess. Finally, it could be that the shame was only waiting to seize this subject, from the “end of the dictionaries”, where the language is deposited, and the contours of the Other are drawn. Moreover, the unconscious, also the discourse of the Other, had been whispering it for a long time. It was written in the dreams, that the shame would catch up one day the child, to dizzy her of its ontological vertigo, and to leave her “haggard”, in evil of being.

La honte est d’abord ce qui montre un sujet, sous les regards de tous. Ce qui dévoile sa nudité, et dénonce son imposture. Ce qui le débusque, genoux repliés sur son manque-à-être, derrière sa parure moïque en toc cette “seconde peau» d’emprunt. Mais elle est aussi ce qui pointe au corps ce sujet, et y imprime sa marque. Éternisant l’ins tant fatal qui n’avait l’air de rien, et laissant sur ce corps, l’entame irrattrapable d’une “mortification » Vraie “petite trace rouge et striée” qui de là, affectera ce sujet d’une vraie “petite douleur perfide”. Cri muet dans l’abdomen. En plus de l’expérience d’un manque, la honte serait donc aussi, le rappel d’un corps en mots, blessé, et en excès. Enfin, il se pourrait que la honte n’attendait que de saisir ce sujet, du “fin fond des dictionnaires”, là où se dépose la langue, et se dessinent les contours de l’Autre. D’ailleurs, l’inconscient, lui aussi discours de l’Autre, le murmurait depuis longtemps. Il était écrit dans les rêves, que la honte rattraperait un jour l’enfant, pour l’étourdir de son vertige ontologique, et la laisser «hagarde”, en mal d’être.

David Bernard, Lacan et la honte – de la honte à l’ontologie, Editions nouvelles du Champ lacanien, Paris, 2019, p. 10

S.

Shame is like literature by Jean-Pierre Martin

Perhaps a writer is that : someone who looks differently, after having experienced the razor’s bite on his head. Decidedly, the shame that is written joins the author’s fantasy, to the point of merging with it. She frees herself, opens the book, and never closes it again. Her intelligence is literary, her outrage, artistic, her trouble, restorative. She is like literature itself: she makes you more lucid.

Peut-être est-ce cela, un écrivain: quelqu’un qui regarde autrement, après avoir connu la morsure du rasoir sur la tête. Décidément, la honte qui s’écrit rejoint le fantasme de l’auteur, au point de se confondre avec lui. Elle se délivre, ouvre le livre, et ne le referme jamais. Son intelligence est litté raire, son outrage, artistique, son trouble, répara teur. Elle est comme la littérature elle-même: elle rend plus lucide.

Jean-Pierre Martin, La Honte – Réflexion sur la littérature, Le Seuil, Paris, 2016, p. 337

S.

Symbolic function of the “name” by Judith Butler

The imaginary relation, the one constituted through narcissistic identification, is always tenuous precisely because it is an external object that is determined to be oneself; this failure to close the distance between the ego who identifies elsewhere and the elsewhere which is the defining site of that ego haunts that identification as its constitutive discord and failure. The name, as part of a social pact and, indeed, a social system of signs, overrides the tenuousness of imaginary identification and confers on it a social durability and legitimacy. The instability of the ego is thus subsumed or stabilized by a symbolic function, designated through the name : the “permanent appearance over time” of the human subject is, Lacan claims, “strictly only recognizable through the intermediary of the name. The name is the time of the object”

Judith ButlerBodies That Matter – On the Discursive Limits of SexRoutledge, 1993, p. 153

La relation imaginaire, celle qui se constitue à travers l’identification narcissique, est toujours fragile, précisément parce que c’est un objet extérieur qui est défini comme moi-même; l’incapacité à réduire la distance entre le moi qui s’identifie ailleurs et cet ailleurs qui est le site de définition du moi hante cette identification comme sa contra diction et son échec constitutifs. Le nom, en tant qu’il fait partie d’un pacte social et même d’un système social de signes, surmonte la fragilité de l’identification imaginaire et lui confère une stabilité et une légitimité sociales. L’instabilité du moi est ainsi dépassée par la fonction symbolique, désignée par le nom: « cette apparence qui perdure un certain temps » du sujet humain n’est, à en croire Lacan, « strictement connaissable que par l’intermédiaire du nom ».

Judith ButlerCes corps qui comptent – De la matérialité et des limites discursives du «sexe» (1993), Editions Amsterdam, Paris, 2018, p. 225

Here Butler quotes :
Jacques Lacan, Le séminaire – Livre II – Le moi dans la théorie de Freud et dans la technique de la psychanalyse1954-1955, Editions du Seuil, 2001, p. 202

D.

Delirium as a piece to glue the flaw by Sigmund Freud

With regard to deliriums, some analyses have taught us that madness is used there as a piece that is initially glued where there had occurred a flaw in the relationship of the ego to the outside world. If the solution of the conflict with the outside world does not yet appear to us more clearly than it does now, it is because in the clinical picture of psychosis, manifestations of the pathogenic process are often covered by those of an attempt at healing or reconstruction.

En ce qui concerne les délires quelques analyses nous ont appris que la folie y est employée comme une pièce qu’on colle là initialement s’était produite une faille dans la relation du moi au monde extérieur. Si la solution du conflit avec le monde extérieur ne nous apparaît pas encore avec plus de netteté qu’elle ne le fait maintenant, c’est que dans le tableau clinique de la psychose les manifestations du processus pathogène sont souvent recouvertes par celles d’une tentative de guérison ou de reconstruction.

Sigmund Freud, “Névrose et Psychose” in Névrose, psychose et perversion (1973), PUF, 2004, p. 285

T.

The rupture of an identification by Octave Mannoni

We thus have a Freudian theory of shame, although Freud never stated it: it is the rupture of an identification at the level of the ego. We could “analyze the analysis” of Uncle Joseph’s dream with this idea, to see ambition, identification, fear of ridicule at work …

Nous avons ainsi une théorie freudienne de la honte, bien que Freud ne l’ait jamais énoncée : c’est la rupture d’une identification au niveau du moi. On pourrait “analyser l’analyse” du rêve de l’oncle Joseph avec cette idée, pour y voir l’ambition, l’identification, la peur du ridicule fonctionner…

MANNONI O.Ça n’empêche pas d’exister, Paris, Seuil, 1982, p. 82

E.

Ego is a grammarians invention by Otto Weininger

Lichtenberg, who, after Hume, also battled with the ego, was still bolder. As a philosopher of impersonality, he corrects our verbal “I think”, into an objective “it thinks”, thereby showing ego is a grammarians invention (Hume also ended his presentation explaining any dissension about identity as a quarrel of words).

Lichtenberg, qui, venu après Hume, est également parti en guerre contre le moi, a été plus hardi encore. Philosophe de l’impersonnalité, il corrige notre « je pense » verbal, en un objectif « cela pense » voulant montrer par là que le moi est une invention de grammairiens (Hume aussi finissait son exposé en expliquant toute dissension au sujet de l’identité de la personne comme une querelle de mots).

Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903) (Editions l’age d’homme). Trad. D. Renaud. Editions l’age d’homme. Lausanne, 1975, p. 134-135

Disclaimer : The works of Weininger are to read knowing the terrible destcruction power they supported, after his own death, against Jewish People, and against Women in general. His texts are sources to understand the common roots between antismetism and antifeminism.

H.

Hume was a remarkable empirical psychologist by Otto Weininger

David Hume analysed the concept of the ego through a criticism which ended discovering the ego contains only a bundle of different perceptions taken in a flux and a perpetual movement. We should, Hume explains in substance, turn away from some metaphysicians, who believe to find in themself another ego than this one. I’m sure I don’t have one, and everyone is as sure as I am. So expresses the world’s gentleman. Next chapters will show how much his irony ultimately falls toward himself only. If, however, this ironic criticism had such an impact, the cause is the overestimation from which its author benefited, and for which the responsibility rests to Kant. Hume was a remarkable empirical psychologist, but was not a genius. There is certainly no great glory in being the greatest English philosopher, but even as a such one, Hume cannot pretend. When we know Kant (despite the “paralogisms”) immediately rejected Spinozism for the only reason he sees in human beings not substances, but only accidents, and considered that the only “nonsense “of this idea was enough to condemn him – I am not sure he would not have moderated the praises which he addresses to the English philosopher if he had known the “Treatise on human nature”, and not only the “Investigation of the morality principles”, later work in which, as we know, Hume doesn’t resume his criticism.

David Hume a soumis le concept du moi à une critique au terme de laquelle il ne crut découvrir en celui-ci qu’une faisceau de différentes perceptions prises dans un flux et un mouvement perpétuel. Il faut, explique-t-il en substance, se détourner de certains métaphysiciens, qui croient trouver en eux un autre moi que celui-ci. Je suis certain pour moi de n’en pas avoir, et chacun en est aussi certain que moi. Ainsi s’exprime l’homme du monde. On verra au chapitre suivant combien son ironie ne retombe finalement que sur lui-même. Si cependant cette critique ironique a eu un tel retentissement, la cause en est la surestimation dont son auteur a bénéficié, et dont la responsabilité revient a Kant. Hume était un remarquable psychologue empirique, mais n’était pas un génie. Il n’y a certes pas grande gloire à être le plus grand philosophe anglais, mais même à ce titre, Hume ne peut prétendre. Lorsqu’on sait que Kant (en dépit des “paralogismes”) a repoussé d’emblée le spinozisme pour la seule raison qu’il voit dans les êtres humains non des substances, mais uniquement des accidents, et a considéré que la seule “ineptie” de cette idée suffisait à le condamner – je ne suis pas sûr qu’il n’aurait pas modéré les louanges qu’il adresse au philosophe anglais s’il avait connu le « Traité de la nature humaine », et non seulement l’« Enquête sur les principes de la morale », ouvrage postérieur dans lequel, comme on sait, Hume n’a pas repris sa critique.

Otto WeiningerSexe et Caractère (1903) (Editions l’age d’homme). Trad. D. Renaud. Editions l’age d’homme. Lausanne, 1975, p. 134

Disclaimer : The works of Weininger are to read knowing the terrible destcruction power they supported, after his own death, against Jewish People, and against Women in general. His texts are sources to understand the common roots between antismetism and antifeminism.

T.

The shadow of the abject has fallen on the ego by Patrick Merot

To be ashamed is, in a paradigmatic way, to be ashamed to discover oneself very small even though one has believed oneself to be great, to be reduced to being a miserable earthworm, a scum, an excretion while thought one was a man. We have sufficiently indicated the anal dimension of identity to which the subject is then reduced: the shame, it is the shadow of the abject which has fallen on the ego. A formulation in which this beyond shame we encounter in melancholy, and the melancholic dimension the experience of shame can include, is hearable.

Avoir honte c’est, de façon paradigmatique, avoir honte de se découvrir tout petit alors même que l’on s’est cru grand, d’être réduit à être un misérable vers de terre, un rebut, une déjection alors qu’on se croyait un homme. On a suffisamment indiqué la dimension anale de l’identité à quoi se trouve réduit alors le sujet : la honte, c’est l’ombre de l’abject tombée sur le MoiFormulation dans laquelle s’entend cet au-delà de la honte que l’on rencontre dans la mélancolie et la dimension mélancolique que peut comporter l’expérience de la honte.

Patrick Merot, « La honte : “ si un autre venait à l’apprendre ” Introduction à la discussion sur le rapport de Claude Janin », Revue française de psychanalyse, 2003/5 (Vol. 67), p. 1743-1756
DOI : 10.3917/rfp.675.1743
URL : https://www.cairn.info/revue-francaise-de-psychanalyse-2003-5-page-1743.htm

O.

Object exposes the anal area of the glorious by Jean Guillaumin

It is the very object to which the Ego sought to exhibit its phallic power and which it wanted to constrain to the passive position, which passes to the other pole and exposes the anal area of the glorious one, thus denouncing and punishing directly, through the talion, the secret sadism that hid the idealization of his desires.

C’est l’objet même auquel le Moi a cherché à exhiber son pouvoir phallique et qu’il a voulu contraindre à la position passive, qui passe à l’autre pôle et met à nu la zone anale du glorieux, dénonçant et punissant ainsi directement, par le talion, le sadisme secret que cachait l’idéalisation de ses désirs.

Jean Guillaumin, “Honte, culpabilité, dépression“, in Revue Française de Psychanalyse, t. XXXVII, no. 5, (1973), p. 1667

C.

Cleavage between the ego and the Superego by Jean-Luc Donnet

This gap between perfection and perfectionment/improvement means identification to the idealized Oedipal parents does not allow the ego to “take itself” as the ideal: there is clearly a hiatus, separation, structural cleavage between the ego and the Superego, and it is from this cleavage that the path of perfectionment/improvement finds his origine; in other words, it is not possible to separate the prohibitive superego side – do not be like your father – and the ideal side – be like your father.

Cet écart entre perfection et perfectionnement indique que l’identification aux parents œdipiens idéalisés ne permet pas pour autant que le moi “se prenne” pour l’idéal : il y a bien hiatus, séparation, clivage structurel entre le moi et le Sur-moi, et c’est de ce clivage que s’origine en quelque sorte le chemin du perfectionnement ; en d’autres termes, il n’est pas possible de séparer le versant surmoïque interdicteur – ne sois pas comme ton père – et le versant idéal– sois comme ton père.

Jean-Luc Donnet, « I. La décomposition de la personnalité psychique (31e Nouvelle Conférence) », dans : , Surmoi (1). Le concept freudien et la règle fondamentale. Tome 1, sous la direction de Donnet Jean-Luc
Paris cedex 14, Presses Universitaires de France, « Monographies de psychanalyse », 1995, p. 15-53
URL : https://www.cairn.info/surmoi-1–9782130454816-page-15.htm

W.

What appears in the shame by Emmanuel Levinas

What appears in the shame is precisely the fact of being riveted to oneself, the radical impossibility of fleeing to hide from oneself, the irremissible presence of the ego to oneself.

Ce qui apparaît dans la honte c’est donc précisément le fait d’être rivé à soi-même, l’impossibilité radicale de se fuir pour se cacher à soi même, la présence irrémissible du moi à soi-même.

Emmanuel Lévinas, De l’évasion (1935), Paris, Biblio Essais, 1998, p. 112 – 113

T.

The object’s investment withdrew in the ego by Sigmund Freud

The object‘s investment, which reveals being resistanceless, has been removed, and the liberated libido has not been transferred on another object, but it withdrew in the ego.

L’investissement d’objet, se révélant peu résistant, a été supprimé, et pourtant la libido libérée n’a pas été reportée sur un autre objet, mais elle s’est retirée dans le moi.

Sigmund Freud, Deuil et mélancolie (1917), PBP, Paris, 2011, p. 56

B.

Blaming a beloved object by Sigmund Freud

We may get the key of the clinical picture by perceiving that reproaches which patient is addressed are actually blaming a beloved object, that he has turned against his ego.

On obtient ainsi la clef du tableau clinique en percevant que les reproches que s’adresse le malade sont en fait des reproches à un objet d’amour qu’il a retournés contre son moi.

Sigmund Freud, Deuil et mélancolie (1917), PBP, Paris, 2011, p. 54

D.

Dream teaches us by Jacques Lacan

So, [the] dream teaches us that – what is at stake in the dream’s function is beyond the ego, what in the subject is from the subject and is not subject’s, this is the unconscious .

[Le] rêve nous enseigne donc ceci – ce qui est en jeu dans la fonction du rêve est au-delà de l’ego, ce qui dans le sujet est du sujet et n’est pas du sujet, c’est l’inconscient.

Jacques Lacan, Le moi dans la théorie de Freud et dans la technique de la psychanalyse, Séminaire livre II (1954 – 1955), Seuil, Paris, 1978, p. 219

E.

Ego wants to incorporate this object by Sigmund Freud

The ego wants to incorporate this object into itself, and, in accordance with the oral or cannibalistic phase of libidinal development in which it is, it wants to do so by devouring it.

Le moi voudrait s’incorporer cet objet en le dévorant, conformément à la phase orale ou cannibalistique du développement libidinal.

Sigmund Freud, Deuil et mélancolie (1917), Paris, PBP, 2011, p. 57-58
or there : http://www.arch.mcgill.ca/prof/bressani/arch653/winter2010/Freud_Mourningandmelancholia.pdf

D.

Difference between a neurosis and a psychosis by Sigmund Freud

In connection with a train of thought raised in other quarters, which was concerned with the origin and prevention of the psychoses, a simple formula has now occurred to me which deals with what is perhaps the most important genetic difference between a neurosis and a psychosis: neurosis is the result of a conflict between the ego and its id, whereas psychosis in the analogous outcome of a similar disturbance in the relations between the ego and the external world.

C’est dans le cadre d’un ensemble de réflexions suscitées par ailleurs, et qui avaient pour objet l’origine et la prévention des psychoses, qu’il m’est venu une formule simple concernant la différence génétique peut-être la plus importante qui soit entre la névrose et la psychose : la névrose serait le résultat d’un conflit entre le moi et son ça, la psychose, elle, l’issue analogue d’un trouble équivalent dans les relations entre le moi et le monde extérieur.

 
Sigmund Freud, « Névrose et psychose » (1924) in Névrose, psychose et perversion, Paris, PUF, 2008, p.282