P.

Phallic function does not contradict Freud by Luce Irigaray

This formulation of a dialectic of sexual relations through the phallic function does not contradict Lacan‘s maintenance of the castration complex in girls as defined by Freud — that is, her lack of having the phallus — and her subsequent entry into the Oedipus complex — or the desire to receive the phallus from the one presumed to have it, the father. Similarly, the importance of ‘penis envy’ in women is not challenged but is further elaborated in its structural dimension.

Luce Irigaray

Cette formulation d’une dialectique des rapports sexués par la fonction phallique ne contrarie en rien le maintien, par Lacan, du complexe de castration de la fille tel qu’il a été défini par Freud – soit son manque à avoir le phallus – et son entrée consécutive dans le complexe d’Œdipe – ou désir de recevoir le phallus de qui est supposé l’avoir, le père. De même, l’importance de “l’envie du pénis” chez la femme n’est pas remise en cause mais davantage élaborée dans sa dimension structurale.

Luce Irigaray, Ce sexe qui n’en est pas un, Editions de Minuit, Paris, 1974, p. 59

Œ.

Œdipus : “All is well” by Albert Camus

But crushing truths perish from being acknowledged. Thus, Œdipus at the outset obeys fate without knowing it. But from the moment he knows, his tragedy begins. Yet at the same moment, blind and desperate, he realizes that the only bond linking him to the world is the cool hand of a girl. Then a tremendous remark rings out: “Despite so many ordeals, my advanced age and the nobility of my soul make me conclude that all is well.” Sophocles’ Œdipus, like Dostoevsky’s Kirilov, thus gives the recipe for the absurd victory. Ancient wisdom confirms modern heroism.

Albert Camus, The Myth Of Sisyphus And Other Essays, Trans. J. O’Brien, 1955, p. 77

Mais les vérités écrasantes périssent d’être reconnues. Ainsi, Œdipe obéit d’abord au destin sans le savoir. A partir du moment où il sait, sa tragédie commence. Mais dans le même instant, aveugle et désespéré, il reconnaît que le seul lien qui le rattache au monde, c’est la main fraîche d’une jeune fille. Une parole démesurée retentit alors: « Malgré tant d’épreuves, mon âge avancé et la grandeur de mon âme me font juger que tout est bien. » L’Œdipe de Sophocle, comme le Kirilov de Dostoïevski, donne ainsi la formule de la victoire absurde. La sagesse antique rejoint l’héroïsme moderne. 

Albert Camus, Le mythe de Sisyphe (1942), Gallimard Folio, Paris, 2021, pp. 166 – 167

Albert Camus, Le mythe de Sisyphe (1942), Gallimard Folio, Paris, 2021, pp. 166 – 167

C.

Criminal tendencies are at work in all children by Melanie Klein

Psychoanalysis has shown that the Oedipus complex plays the most decisive role in the general development of the personality, both in people who later become normal and in those affected by neurosis. Psychoanalytic research has consistently shown that the entire formation of character is also linked to Oedipal development, and that all the nuances of character problems, from the slightly neurotic to the criminal, depend on it. The study of criminality is still in its infancy, but the developments it offers are full of promise. The purpose of this article is to show that criminal tendencies are at work in all children and to put forward some hypotheses on the following problem: what are the factors by virtue of which these tendencies do or do not impose themselves on the personality?

I must now return to the point from which I started. When the Oedipus complex makes its appearance, which, according to the results of my analyses, occurs at the end of the first or beginning of the second year, the primitive stages I spoke of – the sadistic-oral stage and the sadistic-anal stage – are fully at work. They are intertwined with the Oedipal tendencies and therefore target the objects around which the Oedipus complex develops, i.e. the parents. The little boy, who hates his father with whom he competes for his mother‘s love, devotes his hatred, aggression and fantasies born of sadistic-oral and sadistic-anal fixations to him. Fantasies in which the child breaks into the bedroom and kills the father are not lacking in any analysis of a little boy, even a normal one.

Melanie Klein, “Criminal tendancies in normal children” in Love, Guilt and Reparation and Other Works 1921-1945, Hogarth Press, London, 1975

La psychanalyse a montré que le complexe d’Œdipe joue le plus décisif des rôles dans le développement général de la personnalité, chez les gens qui plus tard seront normaux comme chez ceux qu’atteindra la névrose. Les recherches psychanalytiques n’ont cessé de démontrer que la formation tout entière du caractère relève elle aussi du développement œdipien, que toutes les nuances des problèmes caractériels, depuis la déformation légèrement névrotique jusqu’à la déformation criminelle, en dépendent. L’étude de la criminalité en est encore à ses premiers pas, mais les développements qu’elle nous laisse espérer sont pleins de promesses. Le propos de cet article est de montrer que des tendances criminelles sont à l’œuvre chez tous les enfants et d’énoncer quelques hypothèses sur le problème suivant : quels sont les facteurs en vertu desquels ces tendances s’imposent ou ne s’imposent pas dans la personnalité.
Il me faut retourner maintenant au point d’où je suis partie. Lorsque le complexe d’Œdipe fait son apparition, ce qui, selon les résultats de mes analyses, survient à la fin de la première ou au début de la seconde année, les stades primitifs dont j’ai parlé – le stade sadique-oral et le stade sadique-anal sont pleinement à l’œuvre. Ils s’intriquent aux tendances oedipiennes et visent donc les objets autour desquels le complexe d’Oedipe se développe, c’est-à-dire les parents. Le petit garçon, qui déteste son père avec lequel il rivalise pour l’amour de sa mère, lui voue la haine, l’agressivité et les fantasmes nés des fixations sadique-orales et sadique- anales. Les fantasmes où l’enfant s’introduit dans la chambre à coucher et tue le père ne font défaut dans aucune analyse de petit garçon, même si celui-ci est normal.

Melanie Klein, “Les tendances criminelles chez les enfants normaux” in Essais de psychanalyse (1921-1945), Trad. Margueritte Derrida, Editions Payot, Paris, 1968 , p. 212

Melanie Klein, Essais de psychanalyse (1921-1945), Trad. Margueritte Derrida, Editions Payot, 1968, Paris, p. 212

C.

Castration complex makes sexual union fearsome by André Green

However, everything that the analysis of the Wolf Man individualises as a ‘constitution’ harmful to masculinity, can be reversed into a positive value, applied to femininity. And this is the explanation of the article “On the transpositions of the impulses more particularly in anal eroticism” where the penis-baby-feces equivalence is defended as illuminating the vicissitudes of normal feminine sexuality, whereas the same constellation is burdened with a heavy pathological incidence in the Wolf Man. At this point, Freud completes his psychopathology of love life by writing the Taboo of Virginity. Henceforth, the male castration complex is no longer considered only from the angle of the male impotence that results from it, but also from that of what the woman would gain as acquired power by this means by chastising the man. Thus we move from the action of the castrating father to that of the castrating woman. The father deprives without receiving anything other than the preservation of his hegemonic power; the woman, on the other hand, would appropriate what belonged to the man, which she seizes for her own benefit. The castration anxiety emanating from the father was a regulator of sexuality intended to combat its excesses in incestuous confinement. By its extension to the role of the woman (and not of the mother) the castration complex no longer regulates sexuality, it makes sexual union fearsome when it does not become impossible. The evolution of the castration complex in Freud’s work inclines more and more to insist on its narcissistic consequences (the wound inflicted on bodily integrity and self-image). It also induces a narcissistic regression (the fear of the object, the refusal of otherness, the inclination to the inversion of the Oedipus complex) that can go as far as psychosis. It is not irrelevant to note that this evolution coincides with the progressive accentuation of women penis envy in the theory.

Cependant tout ce que l’analyse de l’Homme aux loups individualise comme « constitution » dommageable à la masculinité, peut être renversé en valeur positive, appliqué à la féminité. Et c’est l’explication de l’article « Sur les transpositions des pulsions plus particulièrement dans l’érotisme anal » où est défendue l’équivalence pénis-bébé-fèces éclairant les vicissitudes de la sexualité féminine normale, alors que la même constellation se retrouve grevée d’une lourde incidence pathologique chez l’Homme aux loups. A ce moment, Freud complète sa psychopathologie de la vie amoureuse en écrivant le Tabou de la virginité. Désormais, le complexe de castration masculin n’est plus seulement envisagé sous l’angle de l’impuissance masculine qui en résulte, mais aussi sous celui de ce que la femme en retirerait comme puissance acquise par ce moyen en châtrant l’homme. Ainsi on passe de l’action du père castrateur à celle de la femme castratrice. Le père prive sans rien recevoir d’autre que la conservation de son pouvoir hégémonique ; la femme, elle, s’approprierait ce qui était à l’homme dont elle s’empare à son profit. L’angoisse de castration émanant du père était un régulateur de la sexualité destiné à combattre les excès de celle-ci dans l’enfermement incestueux. Par son extension au rôle de la femme (et non de la mère) le complexe de castration ne régule plus la sexualité, il rend l’union sexuelle redoutable quand elle n’en devient pas impossible. L’évolution du complexe de castration dans l’œuvre de Freud incline toujours davantage à insister sur ses conséquences narcissiques (la blessure infligée à l’intégrité corporelle et à l’image de soi). Il est aussi inducteur d’une régression narcissique (la crainte de l’objet, le refus de l’altérité, l’inclination à l’inversion du complexe d’Œdipe) pouvant aller jusqu’à la psychose. Il n’est pas indifférent de noter que cette évolution coïncide avec l’accentuation progressive de l’envie du pénis chez la femme dans la théorie.

André Green, « Le complexe de castration chez Freud », dans : André Green éd., Le complexe de castration. Paris, Presses Universitaires de France, « Que sais-je ? », 2007, p. 35-70. URL : https://www.cairn.info/le-complexe-de-castration–9782130560173-page-35.htm

C.

Castration’s and sex difference’s denial by André Green

The denial of castration is different from what can be observed in the Oedipus as a challenge in a risky fight. Denial constitutes in fact a paradoxical reinforcement of castration insofar as the one who implements it ignores the cause of the denial and leaves it intact. To recognise the castration complex is already to give oneself the means to limit its effects. For to deny the threat of castration is to deny the entire organisation of the castration complex, and thus to ignore its structuring significance, that which obliges the subject to pose as such in front of it and to affirm the particularities of his own sexual identity in front of to himself and of the other sex. We see this very negation leads almost inevitably to the sex difference‘s denial.

Le déni de la castration est différent de ce qui peut s’observer dans l’Œdipe comme défi dans un combat risqué. Le déni constitue en fait un renforcement paradoxal de la castration dans la mesure où celui qui le met en œuvre méconnaît la cause du déni et la laisse intacte. Reconnaître le complexe de castration c’est déjà se donner les moyens d’en limiter les effets. Car nier la menace de castration, c’est nier l’entière organisation du complexe de castration, c’est donc ignorer sa portée structurante, celle qui oblige le sujet à se poser comme tel face à elle et y affirmer les particularités de son identité sexuelle face à lui-même et à l’autre sexe. On voit que la négation en question débouche de manière presque inévitable sur le déni de la différence des sexes.

André Green, « Le complexe de castration chez Freud », dans : André Green éd., Le complexe de castration. Paris, Presses Universitaires de France, « Que sais-je ? », 2007, p. 35-70. URL : https://www.cairn.info/le-complexe-de-castration–9782130560173-page-35.htm

E.

Ego ideal at the decline of Oedipus by David Bernard

The Name-of-the-Father is that by which, and thanks to which, the child, at the end of the Oedipus, will separate himself from his imaginary identification to the phallus. The child will be shaken off, says Lacan, “unshackled”, detached from his position of metonymic object of the mother. At the end, the necessity of a symbolic identification will open for the child. No more the identification to an image, but an identification to the insignia of the Other, here the father, which insignia will come to constitute, to the decline of the Oedipus, the ego ideal. Finally, this identification with the insignia of the Other will have another consequence: a modification of the subject’s desire. From then on, the ego is not only an imaginary element in the relation to the mother, but subjectifies itself and becomes itself a signifying element.

Le Nom-du-Père est ce par quoi, et grâce à quoi, l’enfant au sortir de l’Œdipe, se séparera de son identification imaginaire au phallus. L’enfant sera ébranlé, indique Lacan, « débusqué», détachés de sa position d’objet métonymique de la mère. Au terme, s’ouvrira alors pour l’enfant la nécessité d’une identification symbolique. Non plus l’identification à une image, mais une identification aux insignes de l’Autre, ici le père, lesquels insignes viendront constituer, au déclin de l’Œdipe, l’idéal du moi. Enfin, cette identification aux insignes de l’Autre aura une autre conséquence : une modification du désir du sujet. Dès lors, le moi n’est plus seulement un élément imaginaire dans le rapport à la mère, mais se subjective et se fait lui-même élément signifiant.

David BernardLacan et la honte – de la honte à l’ontologie, Editions nouvelles du Champ lacanien, Paris, 2019, p. 25

quoting Jacques Lacan, Le Séminaire – Livre V – Les formations de l’inconscient (1957-1958), Le Seuil, Paris, 1998

S.

Shame or Guilt : Œdipus or Ajax by André Green

We understand that we have here two opposed problems which respond to two types of object choice and object investment: with Œdipus the object investment, which generates the guilt through transgression , with Ajax the narcissistic investment of the object, which generates the shame through disappointment.

On comprend que nous avons opposé deux problématiques qui répondent à deux types de choix d’objet et d’investissement de l’objet : avec Œdipe l’investissement objectal de l’objet, générateur par la transgression de la culpabilité, avec Ajax l’investissement narcissique de l’objet, générateur par la déception de la honte.

GREEN André, “Le narcissisme moral” in Revue Française de Psychanalyse Tome XXXIII, Paris, 1969, p. 344

Ajax by Sophocles, in a french translation made by Leconte De Lisle in 1877, is reachable here.

M.

Mothers’s eye surprises the shamefull child by Claude Janin

[…] I think I can postulate here that guilt is made possible by the impersonalization of the Superego heir to the Oedipus complex, while the shame is linked to the collapse of the Early Superego and Ego-Ideal which primary object is projectively carryer. As Guillaumin says, it is the father who surprises the “guilty child”, while, for the “shameful child”, “the eye of the father who surprises is the one of the mother herself”

[…] je pense pouvoir ici postuler que la culpabilité est rendue possible par l’impersonnalisation du Sur-moi héritier du complexe d’Œdipe, tandis que la honte est liée au collapsus Sur-moi précoce – Idéal du Moi dont l’objet primaire est projectivement porteur. Comme le dit Guillaumin, c’est le père qui surprend l’ « enfant coupable », tandis que, pour l’ « enfant honteux », « l’œil du père qui surprend est celui de la mère elle-même »

Claude Janin, « Pour une théorie psychanalytique de la honte (honte originaire, honte des origines, origines de la honte) », in Revue française de psychanalyse, 2003/5 (Vol. 67), p. 1657-1742
DOI : 10.3917/rfp.675.1657
URL : https://www.cairn.info/revue-francaise-de-psychanalyse-2003-5-page-1657.htm
Who quotes
Jean Guillaumin, « Honte, culpabilité, dépression », in Revue Française de Psychanalyse (1973), t. XXXVII, no 5, p. 1003

C.

Cleavage between the ego and the Superego by Jean-Luc Donnet

This gap between perfection and perfectionment/improvement means identification to the idealized Oedipal parents does not allow the ego to “take itself” as the ideal: there is clearly a hiatus, separation, structural cleavage between the ego and the Superego, and it is from this cleavage that the path of perfectionment/improvement finds his origine; in other words, it is not possible to separate the prohibitive superego side – do not be like your father – and the ideal side – be like your father.

Cet écart entre perfection et perfectionnement indique que l’identification aux parents œdipiens idéalisés ne permet pas pour autant que le moi “se prenne” pour l’idéal : il y a bien hiatus, séparation, clivage structurel entre le moi et le Sur-moi, et c’est de ce clivage que s’origine en quelque sorte le chemin du perfectionnement ; en d’autres termes, il n’est pas possible de séparer le versant surmoïque interdicteur – ne sois pas comme ton père – et le versant idéal– sois comme ton père.

Jean-Luc Donnet, « I. La décomposition de la personnalité psychique (31e Nouvelle Conférence) », dans : , Surmoi (1). Le concept freudien et la règle fondamentale. Tome 1, sous la direction de Donnet Jean-Luc
Paris cedex 14, Presses Universitaires de France, « Monographies de psychanalyse », 1995, p. 15-53
URL : https://www.cairn.info/surmoi-1–9782130454816-page-15.htm

S.

Sedimentation in the Ego by Sigmund Freud

We can admit as a common result of the sexual phase – dominated by the Oedipus complex – a sedimentation in the Ego which consists in the production of these two identifications linked in some ways to each other. This modification of the Ego retains its determined position, and opposed the rest of the Ego’s content, as Ego-ideal or Superego.

On peut donc admettre comme résultat le plus général de la phase sexuelle dominée par le complexe d’Œdipe, une sédimentation dans le moi qui consiste dans la production de ces deux identifications accordées de quelque façon l’une à l’autre. Cette modification du moi garde sa position particulière, elle s’oppose au reste du contenu du moi comme idéal du moi ou sur-moi.

Sigmund Freud, Le moi et le ça (1923), PBP, Paris, 2010, p. 80

F.

Functional symbolic phenomena by Sandor Ferenczi

Silberer name “functional symbolic phenomena” images arising in dreams, fantasies, myths, etc.. which, instead of illustrating the content of the thought or fantasy, represent, indirectly, the psychic functioning mode (easy or difficult, disabled, etc..)

Silberer appelle « phénomènes symboliques fonctionnels » les images surgissant dans les rêves, fantasmes, mythes, etc. qui, au lieu d’illustrer le contenu de la pensée ou du fantasme, représentent le mode de fonctionnement psychique (aisé ou malaisé, inhibé, etc.)

 
Sandor Ferenczi, La figuration symbolique des principes de plaisir et de réalité dans le mythe d’Œdipe (1908-1912) in Œuvres Complètes I, Paris, Payot, 1968, p. 219