S.

Subaltern has no access to cultural imperialism by Gayatri Chakravorty Spivak

[…] is subaltern everything that has no access or only limited access to cultural imperialism, which opens up a space for difference. So, who will say that it is nothing but the oppressed ? The working class is oppressed. It is not subaltern. It’s in the logic of capital, you know what I mean? So, to that extent, you can only… So I’m speaking in Gramsci terms. Let’s understand. Do we really have metaphorical use of words that are like minimally metaphorical ? When we say can’t speak, it means that, if speaking implies speaking and listening, that possibility of a response, responsibility, does not exist in the sphere of the subaltern. You bring the subalterns out of nowhere; the only way to produce this speech is to insert the subaltern as a subaltern into the circuit of hegemony, which is what has to happen. Who on earth would want to protect or museify the subordinate? Extremely reactionary museifiers, with dubious anthropological aims! An activist cannot want to keep the subaltern in the space of difference. To do something, to work for the subaltern, means to bring her into the discourse.
The third thing is the worst of all; you don’t give voice to the subaltern: you work for the damn subaltern, you work against the subaltern. The first thing (I’d like to say a word about the work of subaltern historians) is that many people claim subalternity. They are the least interesting and the most dangerous. Just because one belongs to a discriminated minority on university campuses doesn’t mean that one needs the word subaltern or Spivak as a whipping boy, all because she said, from that position, that subalterns cannot speak. They should be interested in the mechanisms of discrimination, and since they can speak, as I am told – yes, they can speak, I agree, they are in the hegemonic discourse. they want a piece of the pie and they are not being given it: let them speak and use the hegemonic discourse. They should not usurp the name of subaltern, and their main goal should not be to smear Spivak.


[…] est subalterne tout ce qui n’a pas accès ou n’a qu’un accès limité à l’impérialisme culturel ce qui ouvre un espace de différence. Alors, qui dira que ce n’est rien d’autre que l’opprimé ? La classe ouvrière est opprimée. Elle n’est pas subalteme. C’est dans a logique du capital, vous voyez ce que je veux dire ? Alors, dans cette mesure, vous pouvez seulement… Donc je parle dans les termes de Gramsci*. Comprenons. nous vraiment l’usage métaphorique de mots qui sont comme minimalement métaphoriques? Quand on dit ne peuvent pas parler, cela signifie que, si parler implique la parole et l’écoute, cette possibilité d’une réponse, la responsabilité, n’existe pas dans la sphère de la subalterne. Vous faites sortir les dites subalternes de nulle part; la seule manière de produire ce discours est d’insérer la subalterne en tant que subalterne dans le circuit de l’hégémonie, ce qui doit arriver. Qui diable peut donc vouloir protéger ou muséifier la subalternité? Des muséificateurs extrêmement réactionnaires, aux visées anthropologiques douteuses ! Un activiste ne peut pas vouloir maintenir la subalterne dans l’espace de la différence. Faire quelque chose, travailler pour la subalterne, cela signifie l’amener dans le discours.
La troisième chose est la pire de toutes; on ne donne pas de la voix à la subalterne : on travaille pour cette foutue subalterne, on travaille contre la subalternité. L’avant dernière chose (j’aimerais dire un mot du travail des historiens subalternistes), c’est que beaucoup de gens revendiquent la subalternité. Ce sont les moins intéressants et les plus dangereux. Ce n’est pas parce qu’on fait partie d’une minorité discriminée sur les campus universitaires qu’on a besoin du mot subalterne ou de Spivak comme souffre-douleur, tout ça parce qu’elle a dit, à partir de cette position, que les subalternes ne pouvaient pas parler. Ils devraient s’intéresser aux mécanismes de discrimination et, puisqu’ils peuvent parler, comme ils me le disent – oui, ils peuvent parler, je suis tout à fait accord, ils se situent dans le discours hégémonique. Ils veulent une part du gâteau et on ne la leur accorde pas : qu’ils parlent et utilisent le discours hégémonique. Ils ne devraient pas usurper le nom de subalterne, et leur but principal ne devrait pas être de salir Spivak.


* in Can the Subaltern Speak ? , Spivak refers to Gramsci to source the Subaltern word, here : Antonio Gramsci, « Alcuni temi della quistione meridionale », in Quaderni del carcere, 1926

Gayatri Chakravorty Spivak, “Annexe – “Les subalternes peuvent-elles parler ?” et ses critiques” in Les Subalternes peuvent-elles parler ?Editions Amsterdam, Paris, 2020, p.130 – 131

A.

Aporia between Subject and Object by Gayatri Chakravorty Spivak

Between patriarchy and imperialism, subject-constitution and object-formation, the figure of the woman disappears, not into a pristine nothingness, but into a violent shuttling which is the displaced figuration of the ‘third-world woman’ caught between tradition and modernization. These considerations would revise every detail of judgments that seem valid for a history of sexuality in the West: Such would be the property of repression, that which distinguishes it from the prohibitions maintained by simple penal law: repression functions well as a sentence to disappear, but also as an injunction to silence, affirmation of non-existence; and consequently states that of all this there is nothing to say, to see, to know. The case of suttee as exemplum of the woman-in-imperialism would challenge and reconstruct this opposition between subject (law) and object-of knowledge (repression) and mark the place of ‘disappearance’ with something other than silence and nonexistence, a violent aporia between subject and object status.

Gayatri Chakravorty SpivakCan the Subaltern Speak ?, p.102

Entre le patriarcat et l’impérialisme, la constitution du sujet et la formation de l’objet, la figure de la femme disparaît, non dans un néant virginal, mais dans un violent va-et-vient qui correspond à la figura tion déplacée de la « femme du Tiers-Monde », prise entre tradition et modernisation. Ces considérations conduiraient à réviser intégralement les jugements qui semblent valides pour une histoire de la sexualité en Occident: Tel serait le propre de la répression, et ce qui la distingue des interdits que maintient la simple loi pénale : elle fonctionne bien comme condamna tion à disparaître, mais aussi comme une injonction de silence, affirmation d’inexistence; et constat, par consé quent, que de tout cela, il n’y a rien à dire, ni à voir, ni à savoir, » Le cas de la suttee comme modèle [exemplum de la femme-dans-l’impérialisme met en doute et déconstruit cette opposition entre le sujet (la loi) et l’objet de connaissance (la répression) : il marque le point de « disparition par autre chose que du silence et de la non-existence, constituant une aporie violente entre le statut de sujet et celui d’objet.

Gayatri Chakravorty SpivakLes Subalternes peuvent-elles parler ?Editions Amsterdam, Paris, 2020, p.120 – 121

Gayatri Chakravorty SpivakLes Subalternes peuvent-elles parler ?Editions Amsterdam, Paris, 2020, p.120 – 121

T.

The subject is a text by Gayatri Chakravorty Spivak

Further, I am attempting to borrow the general methodological aura of Freud‘s strategy toward the sentence* he construed as a sentence out of the many similar substantive accounts his patients gave him. This does not mean I will offer a case of transference-in-analysis as an isomorphic model for the transaction between reader and text (my sentence**). The analogy between transference and literary criticism or historiography is no more than a productive catachresis. To say that the subject is a text does not authorize the converse pronouncement: the verbal text is a subject.

De plus, je tente d’emprunter l’aura méthodologique générale de la stratégie de Freud à l’égard de la phrase* qu’il a construite en tant que phrase, tirée des nombreux récits substantiels similaires que ses patients lui ont faits. Ceci ne veut pas dire que je proposerai un cas de transfert en analyse comme modèle isomorphique de la transaction entre le lecteur et le texte (ma phrase**). L’analogie entre transfert et critique littéraire ou historiographie n’est rien d’autre qu’une catachrèse productive. Dire que le sujet est un texte n’autorise pas l’affirmation contraire: le texte verbal est un sujet.

* Spivak refers here to the well known sentence “A child is being beaten“, which Freud used as title for one of his major article in 1919

** Spivak’s sentence is : “White men are saving brown women from brown men

Gayatri Chakravorty SpivakLes Subalternes peuvent-elles parler ?Editions Amsterdam, Paris, 2020, p.92

S.

Subalterns as women in the shadows by Gayatri Chakravorty Spivak

If, in the context of colonial production, subalterns have no history and cannot speak, subalterns as women are even more deeply in the shadows.

Si, dans le contexte de la production coloniale, les subalternes n’ont pas d’histoire et ne peuvent pas parler, les subalternes en tant que femmes sont encore plus profondément dans l’ombre.

Gayatri Chakravorty SpivakLes Subalternes peuvent-elles parler ?Editions Amsterdam, Paris, 2020, p.65

E.

Epistemic violence by Gayatri Chakravorty Spivak

We should also welcome the search for information carried out in anthropology, political science, history and sociology in these silenced spaces. But, for so much, the supposition and construction of a consciousness, or of a subject, underlie such work and will, in the long run, converge with the imperialist constitution of the subject, mixing epistemic violence with the advancement of knowledge and civilization. And the subalterne woman will always be as mute as ever.

Nous devons également nous réjouir de la recherche d’informations effectuée en anthropologie, en science politique, en histoire et en sociologie dans ces espaces réduits au silence. Et pour tant, la supposition et la construction d’une conscience, ou d’un sujet, sous-tendent un tel travail et vont, à la longue, converger avec la constitution impérialiste du sujet, mêlant la violence épistémique à l’avancement du savoir et de la civilisation. Et la femme subalterne sera toujours aussi muette.

Gayatri Chakravorty Spivak, Les Subalternes peuvent-elles parler ?, Editions Amsterdam, Paris, 2020, p.85