And why be surprised at the absence of a definition of time if one is not surprised at the lack of a definition for the word “chair”? Why not display the same curiosity in all cases where we use a term that has not been defined? For a precise definition indeed specifies the logical use of a word in a sentence. And in fact, it is this grammatical logic of the word “time” that will astonish us. We merely express this astonishment by posing the somewhat incongruous question: “What is it?” This is a symptom of a discomfort we feel because everything around us is not clear, similar to the endless “whys” children repeat. They also denote a certain discomfort of thought and are not necessarily concerned with discovering a cause or reason. (Hertz, Principles of Mechanics.) But what astonishes us in the logical uses of the term “time” are what we might call their apparent contradictions. Saint Augustine was astonished by one of these contradictions when he posed the question: “How can one measure time?” For one cannot measure elapsed time which is in the past, nor future time which does not yet exist, and how would one measure the present which lacks extent?


Et pourquoi s’étonner de l’absence d’une définition du temps si l’on ne s’étonne pas de manquer d’une définition du mot « chaise » ? Pourquoi ne pas manifester la même curiosité dans tous les cas où nous utilisons un terme qui n’a pas été défini ? La définition précise en effet la logique d’emploi d’un mot dans la phrase. Et en fait c’est cette logique grammaticale du mot temps qui aura de quoi nous surprendre. Nous ne faisons qu’exprimer cet étonnement en posant la question, un tant soit peu incongrue: « Qu’est-ce que? » C’est là le symptôme d’un malaise que nous éprouvons parce que tout n’est pas clair autour de nous, c’est à peu près l’équivalent des « pourquoi » que les enfants répètent sans cesse. Ils dénotent eux aussi un certain malaise de la pensée et ne se préoccupent pas nécessairement de découvrir une cause ou une raison. (Hertz, Principes de mécanique.) Mais ce qui nous étonne dans les usages logiques du terme « temps », ce sont ce que nous pourrions appeler leurs contradictions apparentes. Saint Augustin s’étonnait d’une de ces contradictions, lorsqu’il posait la question: « Comment peut-on mesurer le temps ? » Car on ne saurait mesurer le temps écoulé qui se trouve dans le passé, ni le temps futur qui n’existe pas encore, et comment mesurerait on le présent qui est privé d’étendue ?

Ludwig Wittgenstein, Le cahier bleu et le cahier brun – suivi de Ludwig Wittgenstein par Norman Malcolm, Tell, Gallimard, Paris, 1998, p. 80

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